Notre Destination est très prisée des ornithologues professionnels ou amateurs. Nous avons d'ailleurs la chance de pouvoir observer et admirer tout au long de l'année des oiseaux. Certains habitants de notre territoire ont même le don de capturer leur beauté. Nous avons rencontré Didier Cantin, photographe animalier, dont les magnifiques photographies illustrent en grande partie notre rubrique ornithologie.

Il est de coutume de dire qu’une photo vaut mille mots. C’est l’effet que nous font les clichés de Didier Cantin, photographe animalier habitant à Nalliers. Nous nous devions de vous les partager, afin de vous permettre de ressentir pleinement les émotions et la poésie qui s’en dégagent.

Didier Cantin, photographe animalier

Didier Cantin a eu la gentillesse de nous partager ses magnifiques photos d’oiseaux pour agrémenter la rubrique ornithologie de notre site internet ou bien pour illustrer notre guide touristique. Ces oiseaux, vous pouvez les rencontrer toute l’année. Il a accepté de répondre à nos questions sur sa passion de photographe. Il nous a aussi conté l’histoire de quelques-unes de ses photos.

comment devient-on photographe animalier ?

Ta passion Pour la photo

L’intérêt pour la photo et pour la nature vient de mon enfance. On est chasseur de père en fils dans la famille, sauf moi. Je suis d’ailleurs la première génération à ne pas chasser. Pourtant, je devais sans doute y être destiné puisque mon second prénom est Hubert, le saint patron des chasseurs. Donc, mon papa est chasseur. Petit, je l’accompagnais à la chasse dans la plaine et dans le marais, notamment aux Huttes. Mes grands-parents habitaient en face du communal de Nalliers.

ta passion Pour les oiseaux

Mon intérêt pour les oiseaux et la faune en général vient quant à lui de ma formation. J’ai fait des études de biologie dans lesquelles les notions d’ornithologie étaient très présentes. Cela m’est d’ailleurs très utile lorsque je veux prendre des photos animalières. Car il faut en réalité beaucoup de travail de préparation avant de faire une photo et beaucoup de connaissances sur le sujet à photographier. Le travail commence concrètement dans les bibliothèques. Puis vient le temps de l’observation pendant des heures, voire des jours, pour identifier leurs habitudes.

Pour les photos du Hibou des marais par exemple, je suis allé près de 70 soirs de suite sur le terrain avant de prendre les photos. Souvent sans prendre le moindre cliché, juste pour qu’il s’habitue à ma présence. J’ai instauré une routine pour l’oiseau, afin qu’il ne fasse plus attention à moi. J’ai, par exemple, positionné tous les soirs mon véhicule au même endroit. La photo a été prise en hiver vers fin février quand les jours s’allongent. Le plus compliqué avec le Hibou des marais, ce n’est pas de le photographier ! Le plus dur est simplement de le voir, de le trouver, car il peut rester sans bouger. On peut passer à côté de lui sans le deviner. 

 

Quand as-tu commencé la photo ?

J’ai commencé la photo animalière dans les années 80. Cela coutait très cher à l’époque avec les pellicules. En réalité, on garde très peu de photos, on en jette beaucoup. Et quand c’est de la pellicule, ce n’est pas le même prix. J’ai d’ailleurs une anecdote. Je voulais photographier un Héron crabier (On en voit très peu ici, c’est un petit héron blanc que l’on voit beaucoup en Espagne ou dans les marais de Camargue). J’avais tout préparé, la même routine d’observation. J’avais un affut au ras du sol, j’étais allongé avec juste un trou pour passer l’objectif de l’appareil photo. Il est arrivé comme prévu sauf que la pellicule de l’appareil photo n’était pas enclenchée… J’ai repris la photo en 2003, avec le début des appareils photos numériques

Quelle est ta routine avant une prise ?

Cela commence par la connaissance de ce que l’on veut photographier. Il faut faire des recherches. J’utilise beaucoup les livres, les guides. Je regarde ce qui se publie, puis je complète mes connaissances avec internet. Ensuite, c’est de l’observation à la jumelle et au télescope. Il faut imaginer et anticiper le comportement des oiseaux. Par exemple, il faut se positionner avec le vent dans le dos pour avoir les oiseaux de face, car ils décollent et atterrissent face au vent. 

Dis-nous en plus sur tes recherches

Sur une espèce que je connais moins, je vais lire tout ce qui a été écrit sur le comportement, les phases prénuptiales. Il faut lire et regarder ce qui existe. Il y a de grands classiques dans les ouvrages comme les guides Delachaux ou pour les mammifères Robert Hainard. Même s’ils datent, il y a des données utiles dedans. Puis, on complète avec des sites comme oiseaux.net. Ça peut être le son, le chant d’oiseaux pour repérer. Il faut avoir vu chanter un oiseau pour pouvoir reconnaître ensuite son chant d’oiseaux. Il faut associer l’image aux sons.

Combien de temps pour prendre une photo ?

Mon record sur le terrain pour prendre une photo, c’est 16h sans bouger dans un affut fait de palettes d’un mètre sur un mètre, soit environ un mètre cube. Mais, c’est très variable. Le minimum ça peut être l’instantané, l’opportunité, ça peut être quelques secondes. Robert Hainard dit qu’il faut fatiguer la chance. Il faut répéter les choses. C’est innombrable le nombre de fois où je vais dans un affut sans faire de photo.

Pourtant, je ne suis pas quelqu’un de très patient. Je ne supporte pas de faire la queue au supermarché. Mais dans un affut, je suis capable de passer des heures et des heures. Ce n’est pas moi qui détermine tout. J’emmène de la lecture, j’emmène plein de choses. Même si le champ de vision est très petit, je passe mon temps à regarder autour de moi, à écouter. Finalement ça passe très vite. Pour faire une photo de Grue par ex, on rentre de nuit et on ressort de nuit. Si c’est en février, c’est un peu plus long, si c’est en novembre c’est un peu plus court, c’est 13h sans bouger. 

Donne-nous des conseils 

Pour un photographe débutant ou un vacanciers qui souhaite faire son premier cliché d’oiseaux, je conseille une espèce facile à prendre. L’idéal, c’est même la mangeoire l’hiver. J’ai commencé comme ça. Derrière une vitre, avec un papier Canson et un grand angle, sur les Mésanges ou les Rouge-Gorge qui venaient manger sur le rebord de la fenêtre. Après, lorsque l’on maitrise davantage, on peut affiner le choix du fond, de la profondeur du champ…  

Ensuite la lumière, je fais rarement des photos après 10h le matin et l’après-midi c’est en fonction de la saison, il ne faut pas avant 16h en hiver notamment. En été, on peut aller jusqu’à 22h. Avec les appareils modernes, on peut changer les ISO très rapidement. 

Sur la plage, les Bécasseaux sanderling sont simples à capter. Ils ont une routine, ils suivent les vagues, ils remontent en suivant les vagues. Il faut juste les attendre. C’est aussi le cas du Tournepierre à collier ou de la Bernache cravant. La période hivernale est donc la plus propice à la photographie animalière, car il y a moins de monde sur la plage. 

Pour les Aigrettes, les Hérons, que l’on voit beaucoup, c’est plus compliqué. Le tout c’est de bien se cacher et de ne surtout pas bouger. 

Le cliché le plus difficile pour un photographe

L’oiseau le plus difficile à capter dans la plaine pour un photographe, c’est l’Œdicnème criard. Il a une excellente vue et il est très malin. Afin de pouvoir le prendre, j’ai fait les photos avec une radio commande à 50 m. Je suis resté une journée allongé avec l’Appareil photo sur une mini palette, je savais où était le nid, après un mois et demi d’observation. Il y a eu un dérangement, ils ont quitté le nid. J’en ai profité pour aller rapidement mettre mon appareil photo, j’ai fait la mise au point sur les œufs. Je suis allé me cacher avec la télécommande. J’ai attendu un second dérangement qui n’était pas de mon fait, pour aller reprendre mon matériel. Pour sortir d’un affut, j’attends toujours un dérangement extérieur. Souvent, c’est mon épouse qui vient me chercher, comme cela l’oiseau n’associe pas les affuts à un être humain. 

Dans la Baie de l’Aiguillon, c’est le Faucon pèlerin. Ça m’a demandé trois saisons pour pouvoir le photographier ! J’avais mis un piquet dans les prés salés et mon affut à 10 m du piquet, en me disant qu’il viendrait se poser un jour. Le jour où c’est arrivé, c’était extraordinaire. Il s’est posé face à moi, il est resté tranquillement sur le piquet pendant une vingtaine de minutes à se toiletter.

Ton spot préféré

Mes spots préférés sont sans conteste la Baie de l’Aiguillon et la forêt de Mervent. La Baie de l’Aiguillon est un endroit sauvage où il y a beaucoup d’oiseaux. On ne peut pas y accéder facilement, cela nécessite entre 30 et 45 mn de marche dans la vase. Mais on peut voir des grands vols de limicoles et de bécasseaux. Quand il y a 3000 Avocettes, on voit juste une bande noire et blanche, c’est magique. La lumière est superbe. On est dans un territoire plat, donc on a les premières lueurs et les dernières lueurs du soleil.

L’histoire de la photo de l’Avocette

Je peux vous dire au mètre près où ça a été pris. La photo a été prise en hiver, en janvier, en fin d’après-midi. La mer s’est retirée, les Avocettes sont restés dans l’eau. Elles reviennent après quand la mer se retire et apporte de la nourriture. Elles reviennent chasser dans la vase. La vase est comme un miroir, la mer l’a lissé, elle est très humide. Il y a un léger contre jour. On voit mal le bleu des pattes. Je suis resté entre 3 et 4h dans mon affut pour la faire. 

L’Avocette a été prise au cœur de la Réserve de la Baie de l’Aiguillon. Je ne vous dirais pas le lieu exact, je garde mes secrets, un peu comme les pêcheurs… Si on ne sait pas lire les paysages dans la Baie de l’Aiguillon cela peut être aussi dangereux lors des marées hautes. Il faut savoir lire les herbes qui poussent le long des étiers pour les deviner dans la Baie.

Ton cliché préféré

C’est une très ancienne photo. C’était en décembre 2008. Il fait froid, très très froid, c’est à marais haute, je suis dans l’eau. Les Pluviers sont sur les piquets. C’est très dur à faire car le clapot fait monter et descendre l’appareil. La lumière est magique. C’était très paisible. Les oiseaux m’entouraient ils sont venus se poser autour de moi. J’ai fait plusieurs photos et c’est ensuite à l’ordinateur je me suis dit que je pouvais faire un panoramique. J’ai donc assemblé plusieurs photos.

 

Quand je vois une photo j’ai toute l’ambiance sonore autour qui me revient, le vent, l’odeur de l’eau salée… Si quelqu’un l’aime sans avoir tout cela c’est que la photo retranscrit bien tout l’univers qu’il y a autour au moment de la prise.

La photographie, c’est une compression du temps en réalité. Ça demande des heures, des jours, des mois et finalement c’est au millième de seconde que ça se joue. C’est un instant fugitif…
DIDIER CANTIN, Photographe

 

 

Commentaires - 1 commentaire

Marianne de Guerry/Hawtrey-Woore

Grand merci pour ces moments miraculeux et « Fugitifs »


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